Pierre Salagnac, Tourneur et Bronzier

La passion pour le métal a toujours fasciné Pierre Salagnac, un artisan exceptionnel alliant maîtrise du bronze et sculpture sur métal. Ce portrait met en lumière un homme qui partage une passion profonde pour les métiers d’artrares, avec un engagement ferme à préserver et transmettre ces savoir-faire ancestraux aux générations futures. En tant que tourneur–bronzier et sculpteur sur bronze, Pierre a forgé un parcours impressionnant dans l’artisanat traditionnel, une voie marquée par un respect profond pour le matériau et une approche pleine de rigueur et de créativité.

Pierre Salagnac fait partie de ces chanceux pour qui le choix de la voie professionnelle a été une évidence. Dès son plus jeune âge, il a été influencé par son grand-père, qui lui a transmis l’amour du travail manuel. Ce dernier a insufflé à Pierre et à ses frères et sœurs la passion des arts appliqués, notamment le travail du métal.

À 15 ans, Pierre entre à l’École Boulle, une institution de renommée mondiale pour les métiers d’art. C’est ici qu’il découvre sa véritable vocation. Tandis que l’école lui offre un environnement propice à l’épanouissement, c’est la rencontre avec son professeur, Olivier Lebossé, qui marquera un tournant décisif dans sa carrière. Ce maître devient son guide spirituel, lui transmettant les secrets du métier et les valeurs de précision et de rigueur. Pierre choisit de se spécialiser en tant que tourneur et, sur les six élèves de sa promotion, il sera le seul à obtenir son diplôme. Les autres, face à la dureté du travail, abandonneront en cours de route.

Aujourd’hui, c’est au tour du fils aîné de Pierre de suivre les traces de son père et de s’initier à la même spécialité, celle du tournage.

À sa sortie de l’école, Pierre a la chance de travailler sous la direction de l’un des meilleurs maîtres artisans de son époque. Il lui faut quelques années pour maîtriser l’art et les subtilités du travail du métal, perfectionnant chaque geste et chaque technique. Travaillant sur des chantiers prestigieux et pour des clients influents, il apprend l’importance de chaque mouvement, la nécessité de la précision et le respect du matériau. Il comprend que, dans son métier, la confiance des clients est un capital qu’il faut préserver.

Les années 80 marqueront l’apogée du métier de bronzier en France, mais les années 90, avec la crise liée à la guerre du Golfe, provoqueront une chute brutale de cette profession. Cependant, Pierre poursuit son chemin avec persévérance et, suite au décès prématuré de son maître, il hérite de la maîtrise de l’atelier.

À l’âge de 23 ans, Pierre reçoit l’opportunité de remplacer un professeur à l’École Boulle. Ce passage de l’artisan au professeur est un véritable tournant. Il doit alors décomposer et verbaliser des gestes qu’il réalisait jusque-là de manière instinctive, ce qui lui permet de mieux comprendre son propre art. Depuis, il se consacre avec passion à l’enseignement des métiers d’art, préférant travailler avec les jeunes artisans. Il trouve plus gratifiant de les accompagner dans leur apprentissage et leur évolution professionnelle que de travailler avec des maîtres plus âgés attachés à leurs habitudes, parfois erronées.

Un jour, lors d’une visite au Jardin Botanique du Bois de Vincennes, Pierre fait une rencontre décisive. Il est fasciné par la collection de bonsaïs, des plantes millénaires façonnées à la main pour leur donner une forme idéale. Cette expérience lui révèle une relation entre son propre travail du métal et celui des bonsaïs : une fusion entre art et sacrifice, où chaque mouvement est empreint de délicatesse et de précision. Il décide alors de créer des bonsaïs en bronze, sculptant des branches et des feuilles avec la même attention et rigueur qu’un sculpteur de marbre. Ses œuvres, composées de pièces modulables, peuvent être démontées et restaurées, un hommage à la tradition des bronziers.

Pierre a une affection particulière pour le travail de l’or, qu’il considère comme un moyen unique de préserver le métal à travers les siècles. Contrairement aux autres matériaux qui se dégradent avec le temps, l’or résiste à l’oxydation, permettant aux créations artistiques de perdurer. Cette propriété fait de l’or un matériau privilégié dans la conservation des œuvres d’art.

Face à l’indifférence des institutions publiques, Pierre a décidé de se battre pour la préservation des métiers rares. Il fonde le Craft Project, un collectif visant à mettre en lumière les artisans rares et talentueux des coins les plus reculés de la France. À travers des podcasts, il donne la parole à ces maîtres artisans, les faisant découvrir aux jeunes générations et leur offrant un modèle professionnel. Ces podcasts, bientôt accessibles à tous, seront déposés à l’Institut National de l’Audiovisuel afin de préserver cet héritage culturel.

Pierre Salagnac incarne le parcours d’un homme passionné par son métier d’art, un artisan d’exception qui a su transformer son savoir-faire en art. Aujourd’hui, en tant qu’enseignant et défenseur des métiers rares, il œuvre pour la pérennité de ces savoir-faire ancestraux, transmettant son expertise avec humilité et générosité. Grâce à des initiatives comme le Craft Project, il contribue à la préservation de ce patrimoine vivant, garantissant ainsi que les traditions artisanales continuent de rayonner pour les générations futures.